Article publié La Dépêche du Midi
Publié le 9 février 2023
Saint-Girons - Découvrir et se former à la justice restaurative
Articles publiés dans ASH Actualités Sociales Hebdomadaires
Dans le n° 3257 du 29 avril 2022
Le long périple de la justice restaurative
Dans le n° 3242 – 14 janvier 2022
Protection de l’enfance : réunir au lieu de séparer
Article publié dans L'Ariégeois Magazine
Restaurer le lien social. Lre l'article publié dabs L’Ariégeois Magazine - numéro 203
Question de justice, une association mobilisée pour l’introduction des pratiques de judtice restaurative », paru dans FORUM, mai 2017, revue de la CNAPE, fédération des associations de protection de l’enfant. »
Hélène van Dijk, Coordinatrice, formatrice, Association Question de justice
Pourquoi ce nom pour l’association ? Car ce doit être un droit d’utiliser la justice restaurative pour résoudre une question où l’Etat (ou autre représentant d’une institution) est susceptible d’intervenir et de prendre des décisions. Les citoyens, réunis, sont capables d’exercer une influence déterminante sur les questions qui les concernent et leurs propositions doivent être au centre de toute décision.
La justice restaurative considère la réparation des préjudices, des relations
détériorées et des souffrances plus importantes que l’accusation et la punition. Ainsi, en justice restaurative, après un méfait, au lieu de demander : qui a fait cela ? Comment va-t-on le punir ?, nous demandons : qui est la victime ? Comment est-elle blessée ? Qui est responsable pour la réparation ?
Ce changement de point de vue ou de paradigme provoque « une autre justice » (1), car non seulement la société est responsables de ce qui se passe mais, en tout premier lieu, l’auteur du méfait (2) a la tâche de réparer un tant soit peu les blessures qu’il a occasionnées. Comment peut-il s’acquitter de cette tâche ? Comment peut-il savoir ce qui pourra réparer les conséquences de son acte ? En posant cette question à la victime !
Une rencontre s’impose
« Je n’étais rien pour vous. Même maintenant, je ne suis pas moi-même la personne que j’aimerais être. Je ne me sens pas en sécurité, je suis tout le temps sur le qui-vive et je ne peux plus me détendre. Je ne dors pas bien et je revois sans cesse ces deux yeux qui me regardaient. Des yeux qui me fixaient et que je ne pouvais placer. Dans la rue dans chaque paire d’yeux que je ne connais pas, je vois un agresseur potentiel…! Encore maintenant, je me réveille la nuit en criant et en suant, ce moment a été si angoissant pour moi. Avec violence, vous m’avez jeté par terre et vous ne disiez rien. Ce moment a duré si longtemps. La seule chose que je voyais était une paire de chaussures. Et de peur de recevoir un coup de pied, je me suis tue ».
Lors de cette rencontre, victime et auteur pourront se faire accompagner par un proche, et d’autres personnes touchées par ce qu’il s’est passé pourront y participer. La communauté (scolaire, sportive, du quartier ou de l’entreprise) prendra sa responsabilité en y participant également.
En utilisant un processus de dialogue impliquant les parties clés, les besoins individuels et collectifs pourront être reconnus. Des modèles sont conçus, permettant de lancer un processus d’échange et, parfois, de création de lien mais toujours porteur de sens. Les précurseurs des pratiques de justice restaurative les ont étudiés, expérimentés et adaptés aux besoins de leur propre culture. Une fois analysés, ils comprennent tous les cinq thèmes suivants (3) :
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La valorisation des points de vue individuels : chacun perçoit à sa façon une situation ou un événement et a besoin de pouvoir l’exprimer afin de se sentir respecté, valorisé et écouté.
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Le lien entre pensées, émotions et actes.
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L’empathie et l’estime des autres.
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L’identification des besoins avant de définir des stratégies pour y répondre.
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L’importance de la responsabilité collective : les personnes touchées par une situation ou un événement sont le plus à même de savoir ce qui doit être mis en place.
Ces cinq « clés » sont présentes dans toutes les pratiques de justice restaurative qu’il s’agisse de mesures judiciaires, de pratiques quotidiennes (en classe ou dans le travail social par exemple) ou des conférences familiales. En effet, les objectifs poursuivis par la justice restaurative ont également du sens au-delà du champ judiciaire. C’est le cas des conférences familiales utilisées dans le cadre de la protection de l’enfance.
L’exemple des conférences familiales (4)
« Ils vont décider de moi, donc vaut mieux y être ».
Ce processus est contrôlé et préparé en profondeur par un coordinateur. Il soutient et mène à la prise de décisions par la famille concernée pour résoudre un problème concernant par exemple un enfant en danger ou en risque de l'être, ou toute autre personne. Il permet à la famille (ou au jeune à partir de 12 ans) de poser le problème et dechoisir avec ses proches les ressources à mettre en œuvre pour sa résolution. Informée par les professionnels, mais indépendante dans la prise de décision, la famille établit un plan d'action qui répond à toutes les problématiques de la situation. Avec ce plan validé par le travailleur social habilité s’il y en a un ou le juge, la famille prend la responsabilité de résoudre ses problèmes et établit une coopération équitable entre elle et les professionnels.
Les membres de la famille invitent des personnes de confiance pour contribuer à la résolution de la situation. Les mineurs se font accompagner par un adulte de leur choix. Le travailleur social en charge de la famille ou le juge des enfants énonce clairement sous quelles conditions le plan d'action sera accepté.
Le processus prévoit une phase d’entretiens et de préparation avec chacune des personnes invitées. Ensuite, la conférence se déroule en trois phases : une phase de partage d'informations en présence des professionnels invités, une phase de délibération privée du groupe familial, une phase de validation et suivi du plan d'action par le travailleur social.
« Quand il a commencé à frapper sa belle-mère, nous avons décidé de demander une conférence familiale. Même sa mère, que je n’avais plus vu depuis 7 ans, est venue. »
L’exemple de la conférence de justice restaurative
Il s’agit d’une réunion entre toutes les personnes concernées par un délit ou un crime pour décider en commun de la manière d’agir face à ses conséquences, ainsi qu’à ses répercussions futures.
Elle poursuit trois objectifs principaux :
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la réparation de la victime dont le préjudice doit être reconnu et la souffrance entendue ;
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la réinsertion de l’auteur qui participe à la réparation du dommage ;
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le rétablissement de la paix sociale.
La discussion est centrée sur les questions de la victime et la réparation, tant matérielle que symbolique, ainsi que sur ce qui doit être mis en place pour permettre à chacun d’aller de l’avant. Le coordinateur crée les conditions pour que tout le monde puisse parler librement de ce qui s’est passé. Toutes sortes de situations peuvent être concernées : harcèlement, agression, vol, vandalisme, incivilités, etc.
« Tout le monde était convaincu que c’était une question de bandes rivales sur fond de discrimination, mais lors de la réunion il est apparu qu’il s’agissait de jalousie autour d’une fille ».
Un coordinateur de conférences de justice restaurative s’occupe de la préparation et de l’organisation des réunions. En amont, il rencontre tout le monde : l’auteur, la victime, les personnes présentes lors des faits et toute autre personne concernée. La victime et l’auteur viennent accompagnés par les personnes qui les soutiennent. Chacun vient volontairement autour d’un objectif commun : établir un plan de réparation. Lors de la réunion, la victime s’exprime, pose des questions et demande la réparation qu’elle souhaite. L’auteur s’exprime, répond aux questions et participe à l’élaboration du plan de réparation. Par cette coopération, il montre qu’il accepte sa responsabilité. Il comprend le préjudice qu'il a causé ; ses proches et d’autres participants l’aident à assumer sa responsabilité. Une personne peut se sentir honteuse quand elle comprend l'impact de son comportement, mais l’intention est la compréhension, et non la honte. Quand les dispositions du plan de réparation sont claires et acceptées par tous les participants, le coordinateur les met par écrit et tout le monde les signe. Pour clore la réunion, un moment de convivialité est organisé.
« Au moment convivial, les parents de la jeune fille agressée sont allés vers les parents du garçon et leur ont expliqué comment se rendre aux services hospitaliers.»
Des enjeux de formation et de prévention
Les coordinateurssont des personnes neutres, formées, travaillant indépendamment des services sociaux.Ce sont des citoyens qui croient en la capacité des gens et qui souhaitent prendre leur responsabilité en facilitant les conférences. Ils sont formés et accompagnées par notre association. Ils ont des capacités d’écoute, des talents d’organisation, une certaine créativité, une flexibilité, une ténacité, et ils ont confiance dans les capacités et compétences des familles.
« Créer des liens, les entretenir, si nécessaire les réparer est une condition incontournable pour mieux vivre ensemble » est la devise de Question de justice. C’est bien l’objectif ultime : une société où la paix est assurée par tous ceux et toutes celles qui la composent. Pourquoi attendre un grave problème pour lequel on doit mettre en place une conférence ? Pourquoi ne pas essayer de prévenir en introduisant une approche restaurative au quotidien ?
Raison pour laquelle notre association propose des formations aux écoles et aux associations. Les participants développeront une posture qui se définit par le « faire avec ». Car « l’être humain est plus heureux, plus coopératif et productif, et plus enclin à effectuer des changements positifs dans son comportement lorsque les personnes qui sont en position d'autorité font des choses avec lui, au lieu de les lui faire subir ou de les réaliser pour lui ». (5)
« D’où nous vient cette idée folle que pour qu’un enfant fasse mieux, nous devrions d’abord le faire se sentir mal ? Les enfants font mieux quand ils se sentent mieux. » (6)
En est-il autrement pour nous ?
Pour aller plus loin :
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Ouvrage : « La justice restaurative : une approche communautaire de la victime et du coupable » de Howard ZEHR
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Quelques petits films : https://www.youtube.com/channel/UCKs-HhAuk4tGSN4IA1e3NA
Témoignages recueillis par des coordinateurs de justice restaurative
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« Une autre justice », film documentaire à revoir sur www.lcp.fr
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Dans la pratique, il est possible que l’auteur ait été victime et vice versa. Sur le terrain, nous ne parlons pas dans ses termes, nous utilisons les noms des personnes.
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Belinda Hopkins, auteur et directrice : www.transformingconflict.org/content/trademark-five-key-themes
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Une conférence est une réunion entre spécialistes.
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Principe développé par l’International Institute for Restorative Practices, www.iirp.edu
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Expression de Jane Nelson de la discipline positive.
Article publié dans ariegenews.com
Du 26 février au 1er mars, l'association "Parle avec Elles" a organisé une formation "coordinateurs de conférences familiales" à l'attention des habitants du quartier de la Reynerie, au Mirail (Toulouse).
Cette formation a été conduite par Hélène van Dijk (responsable des formations au sein de Question de justice) Après une première action cet automne auprès des acteurs sociaux du territoire sur les approches réparatrices, et notamment les conférences de justice réparatrice, elle poursuit et fait former, cette fois-ci, des habitantes au processus des conférences familiales. L'association Parle avec Elles contribue, avec le soutien de la préfecture, à constituer sur Toulouse un réseau de coordonnateurs formés.
No. 3242 – 14 janvier 2022